Représentation héraldique de la couronne de duc de France.
Représentation héraldique de la couronne de duc et pair de France

Un duc, du latin dux, ducis signifiant « meneur, chef », est le titulaire d'un titre de haute noblesse attribué par plusieurs monarchies européennes depuis le Moyen Âge. À l'origine, c'était une charge militaire puis politique et militaire associée au commandement dans une région frontalière de l'Empire romain.

Empire romain

L'origine de ce titre remonte à l'Empire romain. Ce n’est qu’à partir du IIIe siècle que le titre de dux devint officiellement un rang précis dans la hiérarchie romaine, le mot ayant eu auparavant le sens de guide ou de chef militaire. Les réformes militaires de Dioclétien et Constantin affectèrent alors la défense des frontières à des limitanei ou des populations alliées sous forme de foedus commandées par des duces. Cependant, leurs responsabilités pouvaient dépasser le territoire d’une seule province et se révéler parfois assez étendues[1].

Avant de devenir un titre de noblesse, la qualité de dux est un grade militaire de l'armée romaine du Bas-Empire correspondant au commandement de région frontalières ; on trouve ainsi au IVe siècle en Gaule :

Quand l’administration civile et l’administration militaire furent séparées aux IVe et Ve siècles, le dux, responsable de la défense des provinces frontalières, gagna en importance, ajoutant au sein d’un territoire fort étendu des compétences civiles et juridiques à ses tâches militaires. Le titre de dux (duc) devint alors plus important que celui de comes (comte), d'autant que c’est à la même époque qu’apparaît le comes civitatis, qui lui aussi réunit des compétences militaires et juridico-administratives, mais sur un plan plus local[2]. Les duces étaient alors chefs de l'administration et de la justice aussi bien que du commandement militaire dans les provinces qui leur étaient confiées. Ils étaient, ainsi que les comes (comtes), subordonnés au magister militum (chef de la milice). On comptait 13 duces dans l'Empire romain d'Occident, et 12 dans celui d'Orient. L'invasion des Barbares permit à la plupart des duces de se rendre indépendants dans leurs gouvernements, comme les doges de Venise ou le dux Syagrius, qui devint le chef du royaume de Soissons. Des chefs barbares reçurent aussi ce titre des autorités romaines, et se le transmirent après la dissolution de l'Empire en Occident. Tels furent les duchés des Bavarois et des Alamans.

Moyen Âge

À l'époque franque, sont constitués de grands commandements qualifiés de duchés. À partir des VIe et VIIe siècles, le duc est le maître de toute une région, sinon d’un peuple et joue un rôle capital dans la structuration du royaume franc[3]. Le duc est assimilable à une sorte de gouverneur général. Il exerce, au nom du souverain, des pouvoirs de nature militaire et judiciaire sur un ensemble de comtés. Ainsi, le « duché du Mans » (Ducatus Cenomannicus ou Cenomannensis) couvre 12 comtés situés entre la Seine et la Loire. Le nombre des ducs à l'époque mérovingienne a pu être assez élevé ; pour la seule armée qui en 590 marche contre les Lombards, Grégoire de Tours parle de vingt duces et l’exercitus Burgundionum lancé par Dagobert Ier contre les Gascons en compte dix, dont les noms et nationalités sont connus[4].

France

Duchés médiévaux

Circonscriptions administratives

Dans la continuité de l'administration de l'Empire romain, les différents royaumes germaniques mirent en place des circonscriptions de commandement confiées à des représentants de l'aristocratie, nommés et révoqués par le souverain. Ces ducs avaient souvent autorité sur plusieurs comtés. Les commandements des régions frontalières prenaient le nom de "marche" ou "marquisat". La géographie précise de ces circonscriptions est difficile à établir, d'autant plus que leurs contours étaient très fluctuants. Nombre de ces commandements, devenus héréditaires, évoluèrent en principautés territoriales de type féodal.

Titres féodaux

À la fin du Moyen Âge et à l'époque moderne, le duché et la pairie seront attribués à des ensembles féodaux moins importants, principalement d’anciens comtés. Les titulaires sont le plus souvent des princes de la famille royale, sous la règle de l'apanage qui veut que l'extinction de la descendance mâle du premier titulaire entraîne le rattachement au domaine royal du duché.

C'est notamment le cas du duché d'Anjou ou de celui d'Orléans.

Duchés modernes

Sous les Capétiens la puissance territoriale des ducs diminua à mesure que grandit le pouvoir royal, et le titre de duc finit par n'être plus qu'une dignité.

Le système des duchés de l’Ancien Régime est beaucoup plus complexe que celui de l’époque médiévale. La différence fondamentale est que les nouveaux duchés sont généralement beaucoup moins importants que les duchés médiévaux - ils ne constituent pas de vraies principautés. De plus le statut ducal n’est pas attaché de manière définitive aux fiefs érigés en duchés. Les lettres patentes de création contiennent des clauses de succession qui règlent le devenir des duchés. Dans la plupart des cas, la règle choisie est celle de la succession par les mâles : à l’extinction de la descendance masculine du bénéficiaire de l’érection en duché, le duché revient à son « état antérieur » - seigneurie, comté ou autre.

On distinguait les ducs et pairs, qui siégeaient au parlement; les ducs héréditaires, et les ducs à brevet, dont le titre n'était pas transmissible.

En outre les nouveaux duchés sont hiérarchisés :

  1. les duchés-pairies de France : ils donnent à leur titulaire les privilèges des pairs de France, dont le droit de séance au parlement de Paris. Les lettres patentes de création de ces duchés-pairies doivent être enregistrées au Parlement. Si cette formalité n'est pas accomplie, le duché n’est pas héréditaire. Les ducs et pairs avaient comme possibilité de démissionner de leur pairie en faveur d’un de leurs héritiers qui recevait alors un autre titre ducal, le pair démissionnaire gardant le sien. Ainsi, nombre de titres ducaux sont "dédoublés" entre le père et le fils.
  2. les duchés non pairies : le titre ducal est héréditaire selon les lettres patentes d’érection, mais le titulaire n’est pas pair et ne peut donc siéger au Parlement. Comme les duchés-pairies, les duchés "simples" devaient être enregistrés au Parlement. (Chevreuse, Broglie, Polignac...),
  3. les ducs à brevet d'honneur : il ne s’agit pas à proprement parler de duchés, mais de titres ducaux accordés par le souverain à des individus - et non à des fiefs. Ce titre n'est pas héréditaire, il n’y a donc pas à l’enregistrer au Parlement. Les ducs à brevet d’honneur jouissent de tous les privilèges des ducs non pairs. Les brevets d’honneur ont principalement été utilisés au XVIIIe siècle.

Une ordonnance de Charles IX, rendue en , établit que les duchés héréditaires seraient réversibles à la couronne à défaut des mâles.

Tous les ducs portaient le titre de « cousins du roi », partagé avec les grands officiers de la couronne. Leurs femmes avaient le droit de s’asseoir en présence de la reine - ce que l’on nomme le « tabouret de duchesse ». Depuis , les grands d’Espagne jouissent en France des privilèges des ducs. Un certain nombre de nobles, grands d‘Espagne sans être ducs, avaient donc un rang équivalent à la cour à celui des ducs.

Certains duchés ont changé de nom pendant leur histoire : le duché de Thouars est par exemple souvent dénommé duché de la Trémoïlle. De plus il n’était pas rare que certains fiefs soient érigés en duchés sous un autre nom. Ainsi le duché de Montmorency fut re-érigé en sous le nom d’Enghien, qui resta attaché à un lac de la région de Montmorency, lac qui donna son nom à la ville d’Enghien-les-Bains.

Le titre de duc, aboli à la Révolution française, fut ensuite rétabli. Plusieurs ducs furent créés sous le Premier Empire et sous les gouvernements qui suivirent. Sous l'ancien régime, on désigna, à partir du XVIe siècle, sous le titre de Monsieur le Duc, le fils aîné du prince de Condé. On connaît particulièrement dans l'histoire sous ce nom le duc Henri de Bourbon, qui fut ministre en 1723.

XIXe siècle

Comme les privilèges, les titres nobiliaires seront abolis à la Révolution, puis rétablis du Premier Empire au Second Empire.

Le Premier Empire crée de nouveaux titres ducaux, principalement pour les membres de la famille impériale, pour les titulaires de grandes charges et pour certains chefs militaires. La Restauration, la monarchie de Juillet puis le Second Empire en confère à des personnalités politiques ou militaires.

Depuis la Troisième République, les titres de duc sont seulement maintenus en France, ils ne sont plus créés.

Comtat Venaissin

Les papes, comme souverains du Comtat Venaissin, créèrent dans cette province sept duchés.

Duché souverain de Savoie

Longtemps, du Moyen Âge à 1860, la Savoie fut un État souverain (Duché de Savoie créé en 1416 par le Saint-Empire romain germanique, le titre de duc était le plus haut titre dans la hiérarchie nobiliaire germanique), sur lequel régnait sa propre dynastie : les comtes, puis les ducs et les rois de la maison de Savoie. Les princes souverains de Savoie créèrent dans l'étendue du Duché de Savoie, trois duchés particuliers pour des princes cadets de leur dynastie.

Royaume-Uni

Représentation de la couronne de duc (au Royaume-Uni) en héraldique.

Le titre de duc est le plus élevé de la hiérarchie nobiliaire britannique. Les Britanniques font toutefois la différence entre le duché (duchy), correspondant à un territoire féodal, et la dignité ducale (dukedom). S'il n'existe aujourd'hui que deux duchés, celui de Cornouailles (Cornwall) et celui de Lancastre, tous deux sous le contrôle de la couronne, il existe vingt-sept titres de duc dans les différentes pairies britanniques. Les ducs ont droit aux prédicats de Grâce et de Très-Noble, leur fils aîné au titre « de courtoisie » (le deuxième titre de leur père), et leurs autres fils à celui de lord.

Pairie d'Angleterre

Article détaillé : Pairie d'Angleterre.

Pairie d'Écosse

Article détaillé : Pairie d'Écosse.

Pairie d'Irlande

Article détaillé : Pairie d'Irlande.

Pairie de Grande-Bretagne

Article détaillé : Pairie de Grande-Bretagne.

Pairie du Royaume-Uni

Article détaillé : Pairie du Royaume-Uni.

Belgique (jadis Pays-Bas espagnols puis autrichiens)

Le titre de duc est le deuxième plus élevé de la hiérarchie nobiliaire belge. Il vient après celui de prince, qui est le titre le plus haut dans la noblesse de Belgique.

Le titre de duc, à l'instar de celui de marquis ou de prince, n'est généralement pas octroyé par le roi des Belges à un roturier, mais seulement aux aristocrates dont la famille a déjà porté un tel titre avant l'indépendance de la Belgique (1830).

Danemark

Portrait d'Élie Decazes, premier duc Glücksberg. Il a été président du conseil des ministres français sous Louis XVIII
Élie Decazes, président du conseil des ministres français, premier duc Glücksberg.

Un seul titre de duc fut créé au Danemark.

Allemagne

Quelques duchés, à l'époque moderne puis contemporaine, furent créés en Allemagne du temps du Saint-Empire puis par certains États allemands : Prusse, Bavière, Wurtemberg. Contrairement à la Belgique, le titre de duc est le plus haut de la hiérarchie nobiliaire germanique et vient avant celui de prince.

Autriche

Quelques duchés furent créés à l'époque contemporaine par la Monarchie Autrichienne. Comme en Allemagne, le titre de duc était le plus haut titre nobiliaire autrichien et venait avant celui de prince.

Bohême

Article détaillé : Royaume de Bohême.

Quelques duchés furent créés par les empereurs de la maison d'Autriche, au titre du royaume de Bohême.

Pologne-Lituanie

Trois duchés ont été créés sur le territoire de l'ancien royaume de Pologne-Lituanie, tel qu'il existait du XVIe au XVIIIe siècle :

Le royaume polono-lituanien n'a jamais existé. 1. Tous les titres mentionnés dans l'article font référence au grand-duché de Lituanie 2. En Pologne (royaume de Pologne), il y eut des titres princiers jusqu'en 1795 : la dynastie Piast. Et au XVIIIe siècle, le titre des familles : Poniatowski (frères du roi Stanisław August), accordé en 1764, Poniński, reconnu par le Seym: Massalski, Sapieha. De plus, tous les titres du Saint-État romain (allemand) étaient reconnus en Pologne par un seul acte juridique. 3. Il n'y a pas de voïvodes (voievoda) = duc en Pologne, en République tchèque et en Serbie. Fidèle à l'étymologie du mot, mais à HERZOG (allemand). Le titre de voïvode a été donné aux dirigeants moldaves, mais pas aux Slaves.

Italie

Article détaillé : Italie.

Deux périodes peuvent être observées pour les ducs créés en Italie : le royaume « napoléonien » d'Italie (1805-1814) puis le royaume « unifié » d'Italie (1861-1946). La partie de la liste ci-dessous des ducs créés après 1861 est non exhaustive.

Duchés italiens, jadis États

Ducs du royaume de Naples (liste non exhaustive)

Ducs du royaume de Sicile (liste non exhaustive)

Ducs du royaume des Deux-Siciles (liste non exhaustive)

En 1816 les royaumes de Naples et de Sicile furent réuni en un seul État : les Deux-Siciles.

Ducs du grand-duché de Toscane

Ducs de la principauté de Piémont

Ducs du royaume de Sardaigne (liste non exhaustive)

Saint-Siège

Article détaillé : Saint-Siège.

Les papes, jadis souverains des États de l'Église et aujourd'hui de l'État du Vatican, créèrent comme les autres souverains une noblesse, dont des ducs, même lorsqu'ils perdirent leurs pouvoirs temporels entre 1870 et 1929. La liste ci-dessous est non exhaustive.

Saint-Marin

Article détaillé : Saint-Marin.

La plus ancienne des républiques du monde créa elle aussi une hiérarchie nobiliaire, et parmi les titres qu'elle créa, est celui de duc :

Espagne

Nombre de duchés furent créés, au début, par les Rois de Castille et d'Aragon, puis par les Rois d'Espagne. Certains le furent même par le généralissime Franco.

Duchés créés par les rois de Castille

Duchés créés par les rois d'Aragon

Duchés créés par les rois d'Espagne (maison de Habsbourg)

Duchés créés par les rois d'Espagne (maison de Bourbon)

Duchés créés par Joseph-Napoléon Ier (maison Bonaparte)

Duchés créés par Ferdinand VII et Isabelle II (maison de Bourbon)

Duché créé par Francisco Serrano, régent du royaume d'Espagne

Duchés créés par Charles V (maison de Bourbon)

Duchés créés par Amédée Ier (maison de Savoie)

Duchés créés par Charles VII (maison de Bourbon)

Duchés créés par Alphonse XII et Alphonse XIII (maison de Bourbon)

Duché créé par Xavier Ier (maison de Bourbon)

Duchés créés par Franco

Duchés créés par Juan Carlos Ier

Article détaillé : Juan Carlos Ier.

Portugal

Les rois de Portugal créèrent 28 duchés.

Duchés créés sous l'Ancien Régime

Duchés créés sous le régime constitutionnel

Brésil

Les empereurs du Brésil créèrent sept duchés, dont :

Georgie et Iméréthie

Quatre duchés ont existé en Georgie et en Iméréthie, durant l'époque où ces pays étaient des royaumes, et ces quatre titres ducaux disparurent au cours du XVIIIe siècle, ou en même temps que la monarchie, en Georgie en 1801 et en Iméréthie en 1810.

Japon

Une nouvelle noblesse, à l'occidentale, fut créée au Japon durant l'ère Meiji (1867-1912), par l'empereur Mutsu-Hito. Bien que les Japonais ne fassent guère de distinction entre les titres de prince et de duc, qu'ils regroupaient dans la même classe nobiliaire à laquelle ils donnèrent le nom de "koshaku", on peut tout de même considérer qu'entre 1882 et 1929, 20 titres de ducs furent créés en faveur de ministres ou de hauts militaires, en dehors des membres, mêmes éloignés, issus de la dynastie impériale, et qui eux, reçurent un titre princier. Les titres ducaux comme princiers étaient héréditaires, et hors les titres princiers porté par les fils, frères et neveux de l'empereur Hiro-Hito, qui régna de 1926 à 1989, tous les autres titres du koshaku, comme des autres classes nobiliaires (marquis, comtes, vicomtes et barons) furent supprimés en 1947 par l'administration Américaine qui occupa le pays à l'issue de la 2e guerre mondiale. Toutefois, les actuels héritiers, ayants droit de ces titres, continuent d'être hautement considérés dans la société Japonaise d'aujourd'hui. Les 20 titres de duc furent les suivants :

Autres titres

Les autres titres comprenant le terme duc ne sont portés que par des membres de familles régnantes :

Source partielle

Marie-Nicolas Bouillet et Alexis Chassang (dir.), « Duc » dans Dictionnaire universel d’histoire et de géographie, (lire sur Wikisource)

Références

  1. Karl Ferdinand Werner, Naissance de la noblesse, éd. Pluriel, 2012, p. 423.
  2. Karl Ferdinand Werner, Naissance de la noblesse, éd. Pluriel, 2012, p. 425.
  3. Karl Ferdinand Werner, Naissance de la noblesse, éd. Pluriel, 2012, p. 429.
  4. Karl Ferdinand Werner, Naissance de la noblesse, éd. Pluriel, 2012, p. 428.
  5. a b c et d ces ducs sont également princes de la maison royale.
  6. Il semblerait que c'est le pape qui la créée duchesse de Faëtano, donc le Saint-Siège, et non pas la République de Saint-Marin. « Mlle Fitz-James (Caroline, dite Cara), artiste du théâtre des Variétés, qu'elle a quitté pour épouser le jeune comte d'Avigdor. Le pape lui a donné le titre de duchesse de Faëtano. »
    cf. Georges d'Heylli, Dictionnaire des pseudonymes, Hildesheim, Georg Olms Verlag, , 560 p. (ISBN 978-3-487-40941-2, lire en ligne), p. 153.
    Une autre source indique aussi qu'elle était l'épouse du consul de Saint-Marin.
  7. Le roi d'Espagne retire le titre de duchesse à sa sœur, l'infante Cristina sur lemonde.fr, le .

Voir aussi

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Articles connexes

Liens externes