弥助/弥介/彌介
Alias |
Kuro-san Kurosuke |
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Naissance |
1530-1550 Mozambique |
Pays de résidence | Japon |
Activité principale |
porteur d’armes |
Yasuke (弥助/弥介/彌介 )[1], aussi connu tardivement sous les noms de Kuro-san ou Kuro-suke (くろ助 ), est un Noir africain, arrivé esclave au Japon en juillet 1579. Il rencontre en mars 1581 le daimyo Oda Nobunaga, qui choisit de le prendre à son service. Après la mort de Nobunaga en juin 1582 suite à la trahison d'Akechi Mitsuhide, ce dernier épargne Yasuke, dont on perd la trace par la suite.
Il n'existe que peu de sources historiques à son sujet, mais au milieu du XXe siècle il inspire un livre pour enfants au Japon. À partir du XXIe siècle le personnage, seul samouraï noir de l'histoire, connaît un regain d'intérêt. Il apparaît alors sous une version fictive et romancée non seulement dans des livres, mais également des bandes dessinées, une série télévisée, un jeu vidéo, et d'autres évocations artistiques.
Yasuke, serait né, selon François Solier, au Mozambique[2]. Le , le père jésuite italien Alessandro Valignano, visiteur canonique des missions jésuites d'Extrême-Orient, le prend à son service. Le , les deux hommes quittent Goa, et après des escales à Malacca (Malaisie) et Macao (Chine) ils arrivent au Japon le , à Arima[3] (île de Kyushu). Yasuke n'est pas le premier Noir à arriver au Japon. En 1546, le capitaine portugais Jorge Alvares avait déjà amené des Africains au Japon[4]. L'universitaire Fujita Midori estime à quelques centaines le nombre de noirs ayant ponctuellement résidé au Japon au cours du XVIe siècle, travaillant comme esclaves, comme serviteurs, comme soldats, ou comme artistes, parfois directement au service de daimyo[5].
Le , Alessandro Valignano accompagné des pères Luis Frois et Organtino Gnecchi-Soldo ainsi que de son esclave quittent Kyushu pour Kyoto[6] où règne Oda Nobunaga. La curiosité publique est telle qu'une foule enfonce la porte de la résidence des jésuites pour voir Yasuke. Plusieurs personnes sont blessées. Apprenant cet incident, Oda Nobunaga veut vérifier la couleur de cet homme noir[7] en le déshabillant jusqu'à la ceinture[2]. Selon Otohiko Kaga, la carnation de Yasuke suscite un vif intérêt et un émerveillement. Il avait beau le laver, la peau restait noire[6]. C'est alors que Alessandro Valignano décide de l'offrir comme tribut[8] à Oda Nobunaga.
Oda Nobunaga raconte cette rencontre dans ses mémoires (信長公記, Shinchō kōki) : « Le 23 du second mois, un serviteur noir vint des pays chrétiens. Il semblait avoir 26 ou 27 ans, son corps tout entier était noir comme celui d'un bœuf. Il était solide et avait de la présence. De plus, sa force était supérieure à celle de dix hommes réunis[9][source insuffisante]. »
Au service de Oda Nobunaga, le nom de Yasuke lui est donné[10].
Oda Nobunaga, qui était appelé dans son enfance « Owari no utsuke mono»[11], « l'imbécile d'Owari », était connu dans sa région pour ne pas respecter les exigences propres à son rang. Adulte, il continue d'entretenir des pratiques étonnantes. Amateur de poésie et de cérémonie du thé, il ouvre le pays aux chrétiens, sans pour autant se convertir. Il collectionne des objets venus d'Occident et il est le premier Japonais à apparaître vêtu de tenues européennes. C'est probablement cette extravagance qui l'amène à accueillir Yasuke. Selon un prototype du Shinchō kōki détenu dans les archives du clan Maeda, Oda Nobunaga lui confie un court katana de cérémonie et une habitation.
Le père Organtino Gnecchi-Soldo écrit que les Japonais acceptaient de payer pour voir des esclaves noirs[12]. Outre sa couleur de peau exotique pour un Japonais, il fascinait par sa grande taille. Matsudaira Ietada dans son journal le décrit comme mesurant six shaku et deux sun soit 1,88 m[13] alors que la taille moyenne d'un homme japonais de l'époque est d'1,57 m[14].
Le , Oda Nobunaga est défait à Kyoto par l'armée d'Akechi Mitsuhide. Yasuke part alors à la rencontre de l'héritier de son seigneur au château de Nijō. Oda Nobutada à son tour attaqué et défait, Yasuke est fait prisonnier par les vassaux de Akechi Mitsuhide et présenté devant ce dernier pour qu'il décide de son sort.[réf. nécessaire]
D'après les rapports du jésuite portugais Luís Fróis, Yasuke est épargné par Akechi Mitsuhide, qui déclare ne voir en lui qu'un « animal indigne d'être traité comme un japonais », et qui ordonne qu'il soit renvoyé chez les jésuites aux Indes portugaises[15].
Selon l'historien Midori Fujita, Yasuke aurait été ramené à la mission jésuite de Nanbanji à Kyoto[16]. Nul ne sait ce qu'il est advenu de lui après cet évènement[3]. Il est aujourd’hui impossible de connaître la fin de Yasuke[3].
Yasuke est un prénom masculin courant à l'époque au Japon. C'est aussi le nom d'un personnage du folklore japonais dont l'utilisation la plus connue est dans la pièce intitulée Yoshitsune Senbon-sakura du théâtre bunraku et kabuki[17],[18]. Yasuke est aussi le nom du père de Toyotomi Hideyoshi.
Yasuke était fréquemment surnommé Kuro san, kuro signifiant « noir » : Kuro san peut se traduire par « monsieur Noir ». Toutefois ce nom est postérieur car le suffixe -san n'était pas utilisé à cette époque.[réf. nécessaire]
En 1968, Kurusu Yoshio 来栖良夫 (1916-2001) écrit Kuro-suke, un livre pour enfant qui relate l'histoire d'un jeune homme noir envoyé à Nobunaga comme cadeau d'un missionnaire et qui devient son serviteur. Kuro-suke est joyeux et travailleur. Nobunaga et les membres de la maison en viennent à l'aimer. Quand Akechi Mitsuhide attaque Nobunaga au temple Honnôji, Kuro-suke se bat courageusement. Nobunaga se suicide et Kuro-suke se sauve et est accueilli au temple de Namban. Quand il dort cette nuit-là, il rêve de ses parents en Afrique. L'idée d'un homme noir travaillant pour Nobunaga est assez unique, un peu étrange et humoristique. Les illustrations de Minoda Genjirô ont été saluées pour leur originalité et leur qualité lorsqu'il a reçu le prix de l'association japonaise des écrivains pour enfants en 1969[19],[20].
En 2015, dans Yasuke, Frédéric Marais raconte l'histoire d'un jeune esclave qui n'a pas de nom. S'échappant de son village au pied du Kilimandjaro, il embarque comme marin sur un navire, traverse les mers jusqu'au Japon où il vit des aventures[21].
En 2016, Otohiko Kaga relate dans son livre La croix et l'épée les débuts du christianisme au Japon durant la seconde moitié du XVIe siècle. Otohiko Kaga mentionne uniquement l'épisode où l'on vérifie bien la carnation de Yasuke par Oda Nobunaga[6].
En 2017, le roman Le Samouraï noir de João Paulo Oliveira e Costa narre notamment l'histoire de Carlos, un prince du Congo qui devient un samouraï dans le Japon féodal du XVIe siècle[22].
En 2018, le journaliste franco-ivoirien Serge Bilé narre de façon romancée l'histoire d'un esclave africain au destin hors du commun[23]. À la fin du XVIe siècle, celui-ci se retrouve au Japon où il accompagne son maître jésuite italien puis est laissé à la garde d'Oda Nobunaga. Ce dernier, impressionné par ses extraordinaires capacités physiques et intellectuelles ainsi que par ses facilités pour les langues, en fait son homme de confiance et le premier samouraï étranger du Japon.
En 1999-2000 parait le manga Afro Samurai dont Yasuke a inspiré l'histoire[24].
En 2005, Yasuke apparaît dans le manga et le dessin animé Hyouge Mono, créé par Yoshihiro Yamada (ja)[25].
Le manga L'Homme qui tua Nobunaga de Akechi Kenzaburō et de Tôdô Yutaka, paru en 2016, met en scène Yasuke[26].
La bande dessinée Legend of Yasuke (son of the soil), met en scène Yasuke comme un guerrier Bini qui devient un samouraï[27].
En 2021 paraît la bande dessinée Kurusan, le samouraï noir de Thierry Gloris et de Emiliano Zarcone qui retrace la vie de Yasuke, un esclave qui est parvenu à entrer dans la cour de Oda Nobunaga[28].
En 2015, l'artiste sud-africain Nicola Roos réalise une série de statues représentant Yasuke en armure de samouraï[29]. En 2020, Smaïl Kanouté, un artiste plasticien, danseur et chorégraphe, présente une création vidéo inspirée de la vie de Yasuke[30].
En 2019, un projet de film Yasuke est en cours, avec l'acteur Chadwick Boseman pressenti pour le rôle-titre[31].
En 2021, Netflix produit une mini-série centrée sur le personnage éponyme dans un Japon alternatif et fantastique où interviennent magie et robots[32],[33].
Dans le jeu vidéo Nioh, sorti en 2017, apparaît Yasuke[25].
En 2024, le jeu vidéo Assassin's Creed Shadows de Ubisoft est annoncé comme comptant Yasuke parmi ses personnages jouables, bien que son histoire soit modifiée pour les besoins du jeu[34],[24]. Ceci engendre une polémique, certains fans de la franchise se plaignant que Yasuke n'était pas un « vrai » samouraï et critiquant Ubisoft pour avoir créé un jeu ayant lieu au Japon avec un de ses personnages principaux qui n'est pas japonais. D'autres fans qualifient ces critiques de « racistes » et Ubisoft précise que les créateurs du jeu voulaient un personnage samouraï dont l'histoire « était assez ouverte pour permettre la créativité » et qu'il « offre une perspective unique sur cette période de l'histoire: les joueurs peuvent découvrir le Japon avec lui »[35].
En 2019, le groupe de rap IAM fait référence à Yasuke dans une chanson éponyme, présente sur l'album Yasuke[36].
Une exposition Yasuke, l'esclave samouraï est organisée à Yaoundé au Cameroun en , par Anne-Sophie Omgba[37],[38],[3]. Elle compte 17 grandes planches dessinées de l'artiste camerounais Raimi Sewado représentant Yasuke[3],[37], avec la participation de Julien Peltier (auteur).
En septembre, le chef cuisinier d'origine malienne Mory Sacko, ancien candidat de l’émission Top chef, reçoit à 28 ans sa première étoile au Michelin pour son restaurant MoSuke, ouvert à Paris. Le nom du restaurant est la contraction de « Mo » pour Mory, « Suke » en hommage à Yasuke[39].