Une institution scolaire est une structure sociale et politique destinée à l'éducation, dans le premier degré (écoles maternelle, écoles élémentaire, enfants handicapés) et le second degré (collèges, lycées). (En France). On peut insister soit - juridiquement - sur les lois, les coutumes, les organisations, soit - sociologiquement - sur les associations humaines, les croyances collectives, les pratiques instituées, les routines sociales, les rôles. Une institution a toujours une finalité et une stabilité.
Deux mots fusionnent en une expression : « institution », « école » (l'École). a) Qu'est-ce qu'une institution ? une forme ou une structure sociale établie par la loi ou la coutume, un ensemble socialement organisé où s'exercent les fonctions publiques, un système organisé et stable qui structure des activités sociales (par exemple l'enseignement, ou la justice, le travail…). b) Qu'est-ce que l'École ? l'institution qui se donne pour mission de transmettre les savoirs, d'éduquer aussi, et de favoriser l'insertion sociale ou même professionnelle. c) Qu'est-ce que l'Institution scolaire ? au sens étroit, le système éducatif. d) Qu'est-ce qu'une institution scolaire, du moins en France ? une organisation sociale, relevant souvent du droit public, et qui vise l'éducation, l'instruction, la formation (initiale, continue, professionnelle, par acquis de l'expérience), pour, au moins, des enfants en âge d'obligation d'instruction (6-16 ans).
L'institution scolaire concerne, dans le domaine éducatif, les coutumes, les principes, les règlements, les lois (par exemple, les lois organiques de Jules Ferry), mais aussi les groupements de personnes (par exemple, les personnels enseignants, les lycées agricoles…), mais encore les diplômes d'État, les "ordres de l'enseignement" (primaire, secondaire, supérieur), les fonctions administratives (Recteur, directeur d'école…), les statuts (titulaire/contractuel…), les secteurs (privé/public, laïc/confessionnel)…
L'institution scolaire est une réponse officielle au cri de Charles-Louis Philippe : "Écoles, qu'avez-vous fait de ma jeunesse ?"
Des questions reviennent :
Habituellement, les savants voient dans l'institution scolaire une œuvre d'émancipation, de libération, une lutte contre l'obscurantisme, contre les privilèges, pour l'égalité, l'universalité, bref "les Lumières" (Condorcet[20], Kant[21], Jules Ferry)[22]. Selon Kant :
D'autres savants présentent l'institution scolaire comme répressive, aliénante.
La théorie critique la plus célèbre est celle de Pierre Bourdieu. Pour lui, l'institution scolaire est un instrument de reproduction sociale (P. Bourdieu et Passeron, Les héritiers, 1964). Bourdieu insiste sur les inégalités de chance, de réussite sociale, et dénonce même une tendance à la « reproduction » des catégories sociales. L’école serait un instrument de reproduction sociale au service des classes dominantes ! Selon Pierre Bourdieu, de génération en génération, les individus ou les groupes d'individus cherchent à maintenir ou à améliorer leur position sociale : c'est le principe de la reproduction sociale. Les stratégies de reproduction doivent évoluer. Se met alors en place une nouvelle stratégie de reproduction, qui va passer par l’école. La réussite scolaire des enfants des classes dominantes ne s'explique pas par leur talent (leur don), mais par leur héritage culturel. Chaque participant au jeu social dispose de ressources, largement léguées par les parents. Ces ressources sont assimilables à des capitaux. Capital culturel : ce sont les connaissances comme la maîtrise de la langue (« le choix du mot juste »), l’amour de l’Art ; cela est utilisable principalement à l’école. Capital économique : c'est l’ensemble des ressources matérielles. Capital social : c’est l’étendue des relations sociales ; par exemple, « on hérite d’un carnet d’adresse ».
Structuraliste et marxiste, Louis Althusser a élaboré en 1970 une théorie de l'État. Il décrit d'abord l'Appareil Répressif d'État (« le Gouvernement, l'Administration, l'Armée, la Police, les Tribunaux, les Prisons, etc. »), qui « fonctionne à la violence ». Il décrit ensuite « les appareils idéologiques d'État », « institutions distinctes et spécialisées », qui « fonctionnent à l'idéologie ». Parmi ces « Appareils Idéologiques d'État » : l'« AIE scolaire (le système des différentes Écoles, publiques et privées) », à côté de l'AIE religieux (Églises), l'AIE familial, l'AIE juridique, l'AIE politique, l'AIE syndical, l'AIE de l'information (presse, radio, télé, etc.), l'AIE culturel (lettres, beaux-arts, sports, etc.)[23].
Divers auteurs tiennent l'école pour un ensemble de procédures excluant l’enfant de son désir (R. Boujedra, La répudiation, 1970 ; R. Scherer, Émile perverti, 1972 ; G. Mannoni, Éducation impossible, 1973 ; Celam, Journal d’un éducateur, 1982).
Ivan Illich voit dans l'école un agent reproducteur de la société de consommation (Ivan Illich, Une société sans école, 1971, trad., Seuil, 1972). L'enseignant pontife est « à la fois pasteur de troupeau, prophète et prêtre ». Illich prône la déscolarisation. Michel Foucault, en 1975, dénonce dans l’institution scolaire une structure insidieuse d’enfermement (Michel Foucault, Surveiller et punir, 1975). Il conçoit la modernité comme l'âge des sociétés disciplinaires, l'âge des prisons où, à l'instar de l'école et de l'armée, on enferme pour redresser.