Francesca da Rimini
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Sant'Agostino, Rimini (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Activités
Famille
Père
Conjoint
Blason
William Dyce, Francesca da Rimini, huile sur toile, 1837, National Gallery of Scotland, Édimbourg.

Francesca da Rimini ou Francesca da Polenta (née vers 1255 - morte vers 1285) est une jeune Italienne dont les amours tragiques ont été immortalisées par Dante Alighieri dans la Divine Comédie.

Biographie

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Gianciotto découvre Paolo et Francesca, toile de Dominique Ingres (1819).

D'une grande beauté, Francesca, fille de Guido da Polenta, un noble de Ravenne de la maison des Polenta, a vécu à la fin du XIIIe siècle. Pour des raisons uniquement politiques, son père la maria en 1275 à Gianciotto Malatesta (ou Giovanni) (né vers 1240 - mort en 1304), de Rimini, un homme de valeur mais affligé d'un corps difforme (il était couramment appelé Gianne lo sciancato - Gianciotto le Boiteux). Cette union, destinée vraisemblablement à sceller une alliance politique entre les deux familles, se fit par procuration. Le couple eut une fille, Concordia, et un fils, Francesco.

En 1283 l'un des frères de Gianciotto, Paolo Malatesta (né vers 1246-1248 - mort vers 1285), rentre à Rimini après des affrontements contre les gibelins et retrouve Francesca avec laquelle il entretient une liaison[1]. Lorsque Gianciotto découvre l’adultère, il tue, en les poignardant, sa femme et son frère (selon la légende dans les bras l’un de l’autre alors qu’ils échangeaient un baiser, voire un premier baiser) probablement au château de Gradara entre 1283 et 1285. Toutefois, ce double homicide n’affecta guère les relations entre les deux familles (les archives ne font jamais état ni de l’adultère, ni du meurtre).

Dans La Divine Comédie

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Les deux jeunes amants sont immortalisés dans le Chant V de l’Enfer de la Divine Comédie de Dante, qui transforma cette tragédie en véritable mythe, croisant les thèmes populaires de l’amour interdit et de la damnation éternelle :

« Je parlerais à ces deux qui vont ensemble […] /
Il n’est pire douleur que se souvenir /
Du temps heureux dans la misère […] /
Nous lisions un jour par plaisir /
De Lancelot et comment amour le saisit : /
Nous étions seuls et sans aucun soupçon. /
Plus d’une fois nous fit lever les yeux cette lecture, /
Et pâlir le visage : /
Mais seul fut un point qui nous vainquit. /
Quand nous lûmes le rire désiré /
Être baisé par un tel amant, /
Lui qui jamais de moi ne sera séparé, /
Me baisa la bouche tout tremblant […]

Dante, La Divine comédie[2], « L’Enfer », Chant V, vers 88-142, p. 56-57.

Dante ajoute donc à l’histoire un détail singulier : les amants, avant d’être surpris par Gianciotto Malatesta, lisaient Lancelot, un roman d’amour courtois. Par ce post-scriptum, le poète ajoute au récit une mise en abyme : il évoque l’amour, tout aussi tragique, de Lancelot pour Guenièvre et établit un parallèle entre les deux histoires dramatiques. Il convient en effet de rappeler que Lancelot fut surpris dans la chambre de Guenièvre par Arthur, qui le fit ensuite arrêter. Si le chevalier parvint à s’échapper, Guenièvre fut condamnée au bûcher.

Dante condamne les âmes du cercle des Luxurieux à être perpétuellement emportées par un tourbillon les malmenant. Paolo et Francesca ont pour compagnons d'infortune Hélène de Troie ou encore Cléopâtre.

Littérature

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Musique

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Arts graphiques

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Avant de s’attarder sur les œuvres elles-mêmes, il convient de distinguer au préalable les deux formes de représentation qui sont privilégiées par les artistes. Quand Dante évoque le couple, c’est lors de sa rencontre avec les deux âmes, dans un temps qui est donc présent. Lors de sa conversation avec les Luxurieux, le poète raconte leur histoire, dans un temps qui est passé, révolu. Les artistes vont tantôt reprendre le dialogue entre Dante et les réprouvés, tantôt représenter ce qui a conduit ces derniers à la damnation. Lorsque Paolo Malatesta et Francesca da Rimini sont représentés en train de s’embrasser à la lecture de Lancelot, ou assassinés par Gianciotto Malatesta, ils sont pécheurs ; lorsque c’est leur situation au sein du deuxième cercle de l’enfer qui est favorisée, ils sont damnés.

Toutefois certaines œuvres peuvent prêter à confusion, ou volontairement représenter les deux moments de la vie (ou de la mort) du couple.

Lorsque Auguste Rodin représente Le Baiser (initialement intitulé Paolo et Francesca), ce sont les pécheurs qui l’intéressent, et même davantage le péché de luxure[3]. Néanmoins, lorsqu’il intègre le couple à La Porte de l'Enfer, la nature des amants paraît beaucoup moins évidente. La nudité interroge : représente-t-elle symboliquement l’impudeur liée à l’acte interdit des jeunes amants ou la condition des Luxurieux en enfer ? Rodin brouille ainsi volontairement les pistes (sa connaissance de la Divine Comédie n’est plus à prouver) : la nudité évoque la damnation mais le peintre refuse tout élément iconographique s’y rapportant et mieux encore, il représente un événement – le baiser – censé s’être déroulé alors que les deux protagonistes étaient encore vivants.

Le péché et la damnation se rejoignent également dans une aquarelle de Dante Gabriel Rossetti[4]. Sous forme de triptyque, deux panneaux encadrent Dante et Virgile. Les scènes sont, au contraire de l’œuvre de Rodin, clairement identifiables grâce à une iconographie dégagée de toute ambigüité. À gauche, dans le château de Gradara, Paolo et Francesca s’embrassent, Lancelot ouvert sur leurs genoux. À droite, tandis qu’une pluie de flammes s’abat sur eux, les amants sont emportés par un tourbillon incessant. La damnation apparaît alors comme la conséquence directe du péché.

Paolo et Francesca pécheurs

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Jean-Auguste-Dominique Ingres, Paolo et Francesca, huile sur bois, 35 x 28cm, 1814, musée Condé, Chantilly.
Jean-Auguste-Dominique Ingres, Paolo et Francesca, huile sur bois, 35 × 28 cm, 1814, musée Condé, Chantilly.

Représentés souvent en pleine lecture, échangeant un baiser ou morts assassinés, les amants portent la majeure partie du temps des vêtements typiques du Moyen Âge et particulièrement de l'époque (connue ou fantasmée) de Dante. Voici une liste non exhaustive des œuvres représentant Paolo Malatesta et Francesca da Rimini en tant que pécheurs.

Paolo et Francesca damnés

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George Frederic Watts, Paolo et Francesca, huile sur toile, 152 × 130 cm, 1872 - 1875, Watts Gallery, Compton.
George Frederic Watts, Paolo et Francesca, huile sur toile, 152 × 130 cm, 1872-1875, Watts Gallery, Compton.

Le couple ne garde ici que peu de traces de la période médiévale, la nudité (même pudique) faisant partie intégrante de la condition du damné. Les artistes conservent parfois l'iconographie du châtiment (le tourbillon dantesque) et représentent souvent le dialogue que Dante entame avec Francesca tandis que Paolo, éploré, écoute le tragique récit en maintenant contre lui sa maîtresse. Voici une liste non exhaustive des œuvres représentant Paolo Malatesta et Francesca da Rimini en tant que damnés.

Tirage photographique de 26 × 36,5 cm sur papier albuminé représentant le tableau n° 1625 de Henri Guillaume Martin - Paolo di Malatesta et Francesca di Rimini aux enfers, Fonds Cartes et Plans, Albums des salons du XIXe siècle ; salon de 1883, Cote : F/21/*7653.
Tirage photographique de 13,5 x 17,5 cm sur papier albuminé représentant le tableau n° 1961 de Pierre Louis Marius Poujol - Dans la Tourmente des Voluptueux, Dante aperçoit Paolo et Francesca da Rimini, Fonds Cartes et Plans, Albums des salons du XIXe siècle ; salon de 1890, Cote : F/21/7659.

Paolo et Francesca Luxurieux

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William Blake, Le Cercle de la Luxure, Paolo et Francesca, 1824 - 1827, 374 × 530 mm, City Museum and Art Gallery, Birmingham.
William Blake, Le Cercle de la Luxure, Paolo et Francesca, 1824 - 1827, 374 × 530 mm, City Museum and Art Gallery, Birmingham.

Liste non exhaustive des œuvres représentant le cercle des Luxurieux.

Images

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Notes et références

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  1. Voir à ce sujet l’ouvrage de D'Arco Silvio Avalle, Analyse du récit de Paolo et Francesca : Dante Alighieri, Enfer, V, Krefeld : Scherpe, 1975.
  2. traduit par L. Portier, Paris : Editions du Cerf, 1987 (1re éd. 1472).
  3. Auguste Rodin, « Le Baiser de Paolo et Francesca », La Porte de l'Enfer, versions en bronze et en plâtre, 529 × 396 × 119 cm, (1880 - 1917), musée Rodin et musée d’Orsay, Paris.
  4. Dante Gabriel Rossetti, Paolo et Francesca da Rimini, aquarelle sur papier, 25,5 × 44,9 cm, 1855, Tate Gallery, London, NO3056.

Annexes

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Bibliographie

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Ouvrages
Articles

Articles connexes

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Liens externes

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