Le globe terrestre vu en projection de Bonne.

La projection cartographique est un ensemble de techniques géodésiques permettant de représenter une surface non plane (surface de la Terre, d'un autre corps céleste, du ciel, ...) dans son ensemble ou en partie sur la surface plane d'une carte.

L'impossibilité de projeter le globe terrestre sur une surface plane sans distorsion (Theorema egregium) explique que diverses projections aient été inventées, chacune ayant ses avantages. Le choix d'une projection et le passage d'une projection à une autre comptent parmi les difficultés mathématiques que les cartographes ont dû affronter. L'informatique a apporté des outils de calcul puissants pour traiter ces problèmes.

Terminologie

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Le terme de projection ne doit pas être compris dans le sens de projection géométrique (projection centrale ou perspective, projection orthogonale) mais comme une transformation mathématique faisant correspondre des points du globe et des points du plan. Il est probable que le terme de projection ait été utilisé en référence aux premières représentations planes (stéréographique ou gnomonique) qui sont effectivement des projections centrales.

Cette référence à une transformation géométrique est souvent source d'erreur. C'est pourquoi, le terme, trompeur, de «projection cartographique» est parfois remplacé par celui de «transformation plane»[1] ou «représentation plane»[2].

Description

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D'un point de vue mathématique, une projection permet d'établir entre la surface de la Terre et le plan (ou la surface développable) une correspondance telle que :

et

désignent des coordonnées planes, la latitude, la longitude et des fonctions qui sont continues partout sur l'ensemble de départ sauf sur un petit nombre de lignes et de points (tels que les pôles). Il existe donc une infinité de solutions. Les mathématiciens ne se sont pas privés d'en trouver, et on en connaît plus de 200[3].

De la Terre à la carte

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La Terre a une forme irrégulière. Une projection s'appuie sur une sphère ou un ellipsoïde de révolution qui sont des modèles plus ou moins proches de la forme patatoïde réelle. On commence par choisir, à partir de son géoïde global, un ellipsoïde de révolution représentatif. Il existe plusieurs ellipsoïdes en usage, dont les plus courants sont :

Les ellipsoïdes IAG-GRS80 et WGS84 sont pour la plupart des applications à considérer comme étant identiques. Plus rigoureusement, l'écart en termes de demi-petit axe entre les ellipsoïdes WGS84 et IAG-GRS80 est de 0,1 mm. IAG-GRS80 est l'ellipsoïde mis en place en 1980 par l'International Association of Geodesy comme Geodetic Reference System.

WGS84 signifie World Geodetic System, créé en 1984.

L'ellipsoïde seul ne suffit pas : il est nécessaire de le positionner par rapport à la surface réelle de la Terre. La donnée de l'ellipsoïde et des paramètres de positionnement constitue ce qu'on appelle un datum géodésique à partir duquel pourra être appliquée une projection.

Un datum géodésique est donc défini par :

ou, plus concrètement pour un datum local :

à quoi il convient d'ajouter la projection courante.

Il existe de nombreux datums, chacun adapté à un usage particulier, depuis des représentations globales du globe (ce sont les plus précises, comme DORIS qui permet de mesurer la dérive des continents ou le rebond post-glaciaire) jusqu'à des bases cadastrales (moins précises mais s'ajustant au plus près du géoïde). Voici quelques datums géodésiques en usage :

Les types de projections

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L'indicatrice de Tissot permet d'apprécier les déformations des formes et des aires imposées par un système de projection cartographique ; la projection de Mercator ci-dessus préserve les formes mais pas les aires : c'est une projection conforme.

Une fois un ellipsoïde fixé, on peut choisir le type de projection à appliquer pour obtenir une carte. Cette fois encore, ce choix est conduit par l'usage qui sera fait de la carte mais aussi de la position de la région à cartographier sur le globe.

Classification par les conservations

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Les projections peuvent avoir diverses propriétés :

Une projection ne peut pas être à la fois conforme et équivalente.

L'utilisation de l'indicatrice de Tissot permet d'apprécier le degré de conservation ou de déformation des formes ou des aires.

Classification par le canevas

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Un point du globe étant repéré par sa longitude et sa latitude, une représentation cartographique est caractérisée par l'image des méridiens et des parallèles, c'est-à-dire le canevas de la carte. Les projections cartographiques sont donc également classifiées selon la forme de leur canevas[4]. Certains de ces canevas ont des formes voisines de celles obtenues par projection géométrique sur des surfaces développables (surfaces qui peuvent être étalées sans déformation sur un plan). Les trois surfaces développables les plus courantes, le plan, le cylindre et le cône), donnent lieu aux trois types principaux de projections :

Une projection qui ne peut être classée dans un de ces types est appelée individuelle ou unique.

Projection cylindrique

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Projection cartographique cylindrique directe tangente

Dans la projection cylindrique directe ou normale, le canevas ressemble à celui qui serait obtenu par projection géométrique sur un cylindre d'axe Nord-Sud.

C'est la trame des parallèles qui va différencier les différentes projections cylindriques. La trame associée à la projection centrale n'offre pas d'intérêt cartographique et n'a pas donné lieu à des cartes utilisables.

On distingue, parmi ces projections cylindriques celles dans lesquelles les déformations sont minimales à l'équateur, comme si on projetait sur un cylindre tangent à l'équateur (projection cylindrique tangente) et celles pour lesquelles les déformations sont minimales autour de deux parallèles (projection cylindrique sécante).

Il est parfois intéressant de construire un autre système de repérage sur le globe, constitué de pseudo-méridiens et de pseudo-parallèles, en choisissant sur le globe un autre axe principal que l'axe Nord-Sud[7]. La représentation plane de ces pseudo-méridiens et pseudo-parallèles définit un autre canevas. Quand ce canevas est constitué de pseudo méridiens parallèles et équidistants et de pseudo-parallèles perpendiculaires aux pseudo-méridiens, on parle de projection cylindrique

Dans ces deux cas, le canevas des méridiens et des parallèles n'est plus un quadrillage de droites orthogonales. Par exemple, dans la projection cylindrique transverse, seuls l'équateur et un méridien sont transformés en deux droites perpendiculaires.

Exemple de projection cylindrique : Projection cylindrique équidistante, dite carrée, car le canevas est carré

Exemples de projection cylindrique :

Projection conique

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Projection conique tangente

Le canevas ressemble à celui qui serait obtenu par projection géométrique sur un cône de sommet situé sur l'axe Nord-Sud.

C'est la trame des parallèles qui va distinguer les divers types de projections coniques.

Exemple de projection conique : Projection conique conforme de Lambert

Comme pour les projections cylindriques, on distingue les projections coniques tangentes, où la déformation est minimale sur un parallèle et les projections coniques sécantes quand les déformations sont minimales autour de deux parallèles[10].

Exemples de projection conique :


Projection azimutale

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Projection stéréographique

C'est dans cette classe que l'on va rencontrer des projections vraies (centrales ou orthogonales) ou apparentées. On projette l'ellipsoïde sur un plan tangent en un point ou sécant en un cercle.

Il existe quatre types principaux de projections azimutales, qui se différencient par la position du centre utilisé pour la projection :

Différentes projections gnomoniques

Par ailleurs, selon la position du plan tangent, la projection azimutale est dite polaire (plan tangent à un pôle), équatoriale (plan tangent en un point de l'équateur), ou oblique (plan tangent en un autre point). La projection azimutale polaire sert pour les cartes représentant les lignes aériennes qui passent par les régions polaires afin de réduire la distance de parcours.

Exemples de projection azimutales

Projections uniques

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Il existe de nombreuses cartes qui ne résultent pas d'une projection sur un cône, un cylindre ou un plan :

Références

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Notes

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  1. Patrick Sillard, Les projections et référentiels cartographiques, École nationale des sciences géographiques, sept. 2000, p. 15
  2. Duquenne 1998, p. 10.
  3. Joly, 1985, page 39
  4. a b et c Duquenne 1998, p. 14.
  5. « Les projections, de Mercator au GPS », IGN magazine, no 5,‎ , p. 4-5 (lire en ligne)
  6. Voir quelques exemples dans (en) « Radical cartography », WALL MAPS OF THE WORLD
  7. Duquenne 1998, p. 15-16.
  8. [PDF] « Cylindrical Satellite-tracking projection »
  9. (en) Mei-Ling Hsu, Philip M. Voxland, « Showing Routes for Globe Circlers »
  10. Duquenne 1998, p. 17.

Voir aussi

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Articles connexes

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Liens externes

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