Plou- est un appellatif toponymique préfixé d'origine bretonne qui a pour sens « communauté » puis, par extension, « paroisse »[1].

Il procède du moyen breton ploe, lui-même du vieux breton pluiu. Ce dernier terme est emprunté au latin plebs, plebis, « paroisse ». Les langues celtiques ont aussi fait des emprunts au latin, c'est pourquoi la toponymie bretonne est marquée par la présence d'appellatifs issus de cette langue, ainsi trouve-t-on par exemple l'appellatif toponymique Loc- « lieu » et ses variantes Lo-, Lou- ou Lec'h qui remonte au latin locus, loci de genre masculin et de sens identique. Loc- est extrêmement répandu également, parfois conjointement à Plou-, ex. : Plounévez-Lochrist).

Plou- est à l'origine de très nombreux toponymes bretons ayant comme premier élément Plou-, Plo-, Plé-, Pleu- ou Plu- : et quelques autres variantes peu nombreuses comme Poul-)[2].

Le nom commun breton ploue ou ploe (du moyen breton ploe) qui a ce même sens y trouve également son étymologie[3],[4]. En breton moderne, on utilise plutôt le terme parrez.

Plou- et Gui-/Gwi-, plou-, lann et loc

En règle générale, on distingue en breton le plou (la paroisse entière, c'est-à-dire le bourg et les hameaux, soit l'équivalent du pagus roman) du gwi (le bourg seul), mais cette distinction n'apparaît pas toujours dans les formes officielles des toponymes (ex. : Ploudalmézeau en français correspond à Gwitalmeze en breton moderne). Plus que des désaccords proprement linguistiques, la neutralisation récurrente de la distinction plou / gwi en toponymie française reflète l'opposition entre les milieux administratifs et les couches populaires de l'ancienne société bretonne : la forme en Gwi- était souvent d'usage oral, la forme en Plou- d'usage écrit (c'est d'ailleurs souvent cette dernière qui est attestée dans les textes les plus anciens). Les gens du bourg s’identifiaient en effet d'abord à ce dernier avant de se retrouver dans la paroisse tout entière.

« Sans doute la ploue naquit-elle de la nécessité d'encadrer d'emblée des populations à peine christianisées » à une époque où il n'existait pas encore de structures monastiques. « Le fait que dans près de 80 % des cas le terme ait pour déterminant un nom de saint indique que ces communautés se déterminaient par rapport aux pasteurs autour de qui elles se constituèrent et se cristallisèrent. (...) Pour les deux tiers d'entre eux, ces saints éponymes sont inattestés par ailleurs ou inconnus. Leur culte a parfois disparu. Ils ne sont plus qu'une cinquantaine à être honorés dans les anciennes ploue auxquelles ils ont donné leur nom »[5].

Article détaillé : Liste des saints bretons.

Parfois les ploue et les lann (« ermitage ») partagent les mêmes saints éponymes comme Plouedern et Lannédern (qui font référence à saint Edern), Ploërdut et Lanildut (qui font référence à saint Ildut), etc. Le nom de certaines ploues indique qu'elles se sont constituées à partir d'un ermitage comme à Guiclan (appelé encore Ploulan au XVIe siècle, Poullan (Ploelan en 1405), Plélauff (Ploelan en 1311), Plélan-le-Grand et Plélan-le-Petit[6].

179 occurrences de l'appellatif toponymique préfixé Plou- et ses variantes Plo-, Plœ-, etc. comme début de nom de lieu sont recensées en Bretagne. Il existe un seul nom de paroisse commençant par l'appellatif plou- dans l’évêché de Nantes, un seul aussi dans celui de Rennes, cinq dans celui de Dol, douze dans celui de Saint-Malo, ils sont nombreux par contre dans les autres évêchés situés en Bretagne occidentale[6]. En revanche, il n'en existe aucun dans les autres régions de France et les apparents Plou ou autres nom en Plou-, Pleu-, hors de Bretagne, sont dus à des coïncidences phonétiques liées à la mutation d'une syllabe initiale en gallo-roman ou en ancien français qui engendre des homographies et des homophonies.

D’autres éléments de noms de lieux préfixés sont également fréquents en Bretagne comme l'appellatif tre ou tref, qui procède du vieux breton treb signifiant « hameau, village » et qui prit par la suite au Moyen Âge le sens de trève (Treffiagat, Trégastel, Tréguier, Trébeurden, Trénivel (en Scrignac), Trémaouézan, etc.) et surtout le préfixe loc ou lok, qui est le plus courant avec environ 250 noms de lieux recensés ; cet appellatif préfixé est presque toujours suivi du nom d’un saint, dans environ 60 % des cas celui d’un saint breton, mais dans presque 40 % des cas le saint éponyme n’est pas breton, mais fait référence à un saint reconnu par l’église catholique (Locmaria, Lochrist, Locjean (en Riantec), Locmiquélic, Locmariaquer, Loc-Brévalaire, etc.) ; Dans deux cas seulement, l'appellatif loc, qui signifie en breton « lieu consacré » et qui est issu du latin locus (lieu), n’est pas suivi d’un nom de saint : Locminé (noté Locmenech en 1060, ce qui signifie en vieux breton « le lieu des moines », locus monachorum en latin médiéval) et Locmeltro, un hameau de Guern, qui signifie « le lieu de la vallée de la boule »[6].

Exemples de toponymes commençant par l'appellatif préfixé Plou- (et ses variantes)

Toponymes en Plou- et Plo-. Ailleurs qu’en Bretagne, il s’agit d’une syllabe initiale sans rapport avec l’appellatif breton.

Toponymes commençant par Plou-

Toponymes commençant par Plo-

Toponymes commençant par Plé-, Ple(r)-, Ple(s)-

Toponymes commençant par Pleu- ou Ploe-

Toponymes commençant par Plu-

Autres graphies

Plouc

Le qualificatif péjoratif de plouc serait à l’origine un surnom attribué aux émigrés bretons dans la région parisienne à la fin du XIXe siècle, car nombreux étaient ceux provenant de communes dont le nom commençait par l’appellatif préfixé Plou-[8].

Notes et références

  1. Jean-Christophe Cassard, La Bretagne des premiers siècles - Le Haut Moyen Âge, èd. Les Universels Gisserot, p. 58-64
  2. Pierre Trepos, Les saints bretons dans la toponymie, revue Annales de Bretagne, 1954, no 61-2, pages 372-406, lire en ligne
  3. https://fr.wiktionary.org/wiki/ploue Ploue, Wiktionnaire
  4. Dictionnaire Favereau breton-français-breton - GrandTerrier
  5. Bernard Tanguy, Les noms de lieux. Mémoire des hommes et du paysage, revue ArMen no 22
  6. a b et c Bernard Tanguy, op. cit.
  7. « Plélo : Histoire, Patrimoine, Noblesse (commune du canton de Châtelaudren) », sur infobretagne.com (consulté le ).
  8. Francis Favereau, « Ploucs », dans Alain Croix et Jean-Yves Veillard, Dictionnaire du patrimoine breton, Rennes, Apogée, , p.774.