Les langues occitano-romanes (catalan : llengües occitanoromàniques, occitan : lengas occitanoromanicas) sont une branche des langues romanes qui englobe l'occitan et le catalan élargie parfois à l'aragonais, au piémontais et au royasque.
Elles se parlent dans cinq pays d'Europe: en Andorre, en Espagne (Catalogne, Communauté valencienne, Îles Baléares, Frange d'Aragon, El Carche), en Italie (Vallées occitanes, Alghero, Guardia Piemontese), en France (région culturelle d'Occitanie et Pyrénées-Orientales catalanes), et à Monaco, ainsi qu'historiquement dans le comté de Tripoli (Liban), en Algérie française et dans les possessions de la couronne d'Aragon : Duché d'Athènes, Sud de l'Italie, etc.
On retrouve aussi des communautés linguistiques existantes ou historiques dans l'Europe protestante (Allemagne, Suisse, etc.) et dans le Nouveau Monde : Argentine, Uruguay, États-Unis, etc.
Un débat existe sur l'existence de ce groupe de langues où s'opposent des critères linguistiques à des critères politiques. Toutefois, dans leur forme écrite, le catalan moderne et l'occitan moderne sont hautement intelligibles ; le pourcentage de lexique commun est supérieur à celui existant entre l'espagnol et le portugais. Les langues occitano-romanes sont donc très proches, de plus elles forment un continuum linguistique transitionnel entre les langues ibéro-romanes et les langues gallo-romanes[2].[source insuffisante] La proximité avec les parlers gallo-italiques peut aussi être relevée. De fait, il existe des raisons fondées pour considérer les langues occitano-romanes comme un groupe phylogénétique valide (sens linguistique) ; à la différence des anciennes classifications qui les faisaient appartenir à des groupes polyphylétiques différents (sens géographique).[réf. nécessaire]
Selon certains linguistes, l’occitan et le catalan doivent être considérées comme des langues gallo-romanes. D’autres linguistes y classent l'occitan, mais considèrent le catalan comme faisant partie des langues ibéro-romanes. Certains linguistes classent le catalan dans le diasystème occitan. De ce fait, le catalan serait considéré comme une variante occitane de type Ausbau[4].[évasif]
La question en débat est autant politique que linguistique, car la division classique entre gallo-roman et ibéro-roman repose sur l'idée que la France et l'Espagne sont des États-nations. Cette classification s'appuie donc plus sur des critères territoriaux que sur des critères historiques et linguistiques. L'un des principaux promoteurs de l'unité des langues de la péninsule Ibérique était le philologue espagnol Ramón Menéndez Pidal. En France, un courant autour de Gaston Paris s’attacha à présenter l'unité des dialectes gallo-romans en y incluant l'occitan. Tandis que déjà bien avant d'autres linguistes comme Wilhelm Meyer-Lübke[5] et Friedrich Christian Diez ou plus récemment comme Louis Alibert[6] ont soutenu la parenté de l'occitan et du catalan.[réf. nécessaire]
La réponse à la question de savoir si le gascon et le catalan doivent être considérés comme des dialectes occitans ou des langues distinctes a longtemps été affaire d'opinion ou de convention, plutôt que la sanction de critères scientifiques. Cependant, les deux études citées ci-après soutiennent que le gascon et le catalan doivent être considérés comme des langues étrangères à l'occitan :
Ces résultats ont incité certains linguistes à abandonner le classement traditionnel du gascon comme dialecte de l'occitan, en l'alignant sur celui du catalan qualifié de « langue distincte »[citation nécessaire]. Les deux études ont soutenu l'intuition précoce de feu Kurt Baldinger, un spécialiste de l'occitan médiéval et du gascon médiéval, qui a recommandé que l'occitan et le gascon soient classés comme langues distinctes[9],[10].
Le « Bulletin de l'observatoire des pratiques linguistiques », publié par le ministère de la Culture français, estime pour sa part, que seule l'appartenance du béarnais/gascon à l'ensemble occitan peut être légitimement discutée[a]. Il poursuit en précisant qu'un consensus se dessine pour considérer que le béarnais/gascon « constitue, du point de vue de sa genèse[b], un ensemble distinct de l'occitan proprement dit ». Mais en évoluant en « symbiose » avec ce dernier depuis des siècles, le béarnais/gascon est généralement considéré comme étant une variété de la langue d'oc.
Gerhard Rohlfs a étudié particulièrement le gascon en le comparant aux autres idiomes pyrénéens, basque et aragonais notamment, y compris en allant enquêter sur le terrain des deux versants pyrénéens[11]. Prolongeant les travaux précurseurs d'Achille Luchaire[12], il montre les parentés entre gascon et basque, particulièrement pour des noms de plantes, d'animaux, de relief ou de terrain (sans équivalent latin ?) mais aussi du gascon avec l'aragonais et le catalan, ainsi que l'espagnol.
Pierre Bec considère[13] un domaine occitano-roman, au sens large, qui regroupe les langues et dialectes (parlers) du midi de la France (exception faite du basque aux caractéristiques distinctes et du poitevin-saintongeais qui est une langue d'oïl). Sur la base de différents traits linguistiques communs ou distinctifs, il conclut en deux façons, selon lui, de regrouper ou séparer les sous-ensembles de ce domaine occitan-roman, voici la première :
La seconde façon de classer les sous-ensembles précédents, selon Pierre Bec, est décrite au chapitre « Autres classifications possibles ».
La position de l'aragonais est moins claire, il partage un certain nombre d'anciens isoglosses importants avec le catalan et l'occitan qui ne figurent pas dans les langues ibero-romanes. Cependant, la langue navarro-aragonaise a subi une restructuration majeure dans les derniers siècles et elle s'est considérablement rapprochée des langues ibéro-romanes, occultant certaines des caractéristiques occitano-romanes. Le navarro-aragonais a pratiquement disparu de tout son territoire historique. Seul subsiste aujourd'hui le haut-aragonais (accroché aux Pyrénées) qui est la forme la plus proche de l'occitan général et du catalan.
Le royasque et le brigasque sont considérés comme des parlers de transition entre l'occitan et le ligure. Ils sont généralement classés dans le ligure. Cependant la population locale revendique son appartenance à l'Occitanie.
Les premiers documents en piémontais datent du XIIe siècle, alors que la langue était encore très proche de l'occitan. Le piémontais littéraire s'est développé aux XVIIe et XVIIIe siècles et possède toujours une norme propre et stable. Bien qu'il fasse une transition entre le lombard et l'occitan, il est habituellement classé dans le gallo-italique. Toutefois, il possède également un lexique, une phonétique et une morphosyntaxe particulière.
Même si la plupart des linguistes actuels séparent le catalan de l'occitan, les deux langues sont parfois confondues dans les travaux de linguistes[Lesquels ?] tentant de classer les dialectes de l'occitan dans des groupes supradialectaux.
C'est le cas de Pierre Bec[14], repris plus récemment par Domergue Sumien[15], qui définit (p. 36, p. 52-54) une « structuration supra-dialectale » en décrivant, pour un ensemble « aquitano-pyrénéen (centré autour du gascon) », des traits communs du gascon avec le languedocien pyrénéen – parlé au sud, environ, d’une ligne Bordeaux-Toulouse-Narbonne.
Par la suite, Bec a développé cette classification en élaborant l’idée d’un groupe supradialectal aquitano-pyrénéen ou préibérique incluant le catalan, le gascon et une partie du languedocien. Tandis qu'ils ont classé le reste de l'occitan dans un autre groupe ou dans deux autres groupes supradialectaux (arverno-méditerranéen, occitan central). Cette classification (structuration) supra-dialectale comprend trois groupes :
Transcription phonétique et écritures normées des chiffres dans les différentes variétés occitanoromanes [16],[17]:
GLOSE | Occitan septentrional | Occitan méridional | Catalan | ||||
---|---|---|---|---|---|---|---|
Auvergnat | Limousin | Gascon | Languedocien | Provençal | Oriental | Occidental | |
'1' | yn / yna/ynɔ
un, una |
yⁿ / ynɔ un / una |
y / yɔ un / ua |
yn / ynɔ un / una |
yn / ynɔ/yna un / una |
un / unə un / una |
un / una un / una |
'2' | du / dua
dos, doàs |
du / dua dos / doas |
dys / dyɔs dus / duas |
dus / duɔs dos / doas |
dus / duas dos / doas |
dos / duəs dos / dues |
dos / dues (val. dos) dos / dues (val. dos) |
'3' | tre / tri
tres |
tɾej tres |
tɾes tres |
tɾes tres |
tɾes/tʀes tres |
trɛs (bal. trəs) tres |
tres tres |
'4' | katʀə
quatre |
katɾe quatre |
kwatə quatre |
katɾe quatre |
katɾe/katʀe quatre |
kwatrə quatre |
kwatre quatre |
'5' | ʃiⁿ
cinc |
ʃiⁿ cinc |
siŋk cinc |
siŋk cinc |
siⁿ/siŋk cinc |
siŋ / siŋk cinc |
siŋ / siŋk cinc |
'6' | sej
seis |
sej
sieis |
ʃeis sheis |
sjɛjs sièis |
sjɛj sièis |
sis sis |
sis sis |
'7' | setə
sete |
se sèt |
sɛt sèt |
sɛt sèt |
sɛ/sɛt sèt |
sɛt set |
sɛt set |
'8' | œ / œj
eut / uèit |
œj / œi
uech / ueit |
wɛit ueit |
ɥɛʧ uèch |
ɥɛ/ɥɛʧ uèch |
bujt (bal. vujt) vuit |
bujt (val. wit) vuit (val. huit) |
'9' | nɔw
nòu |
nɔw nòu |
nɔw nòu |
nɔw nòu |
nɔw nòu |
nɔu nou |
nɔu nou |
'10' | de
detz |
de dètz |
dɛʦ dètz |
dɛʦ dètz |
dɛs dètz |
dɛu deu |
dɛu deu |
On distingue les formes masculines et féminines pour les chiffres '1' et '2'.
Le catalan a gagné du terrain sur l'occitan dans le Capcir et peut-être le Roussillon[18].
Peu de temps après l'élaboration par Bec de cette nouvelle notion de langues occitano-romanes, Henri Guiter, directeur de l’Atlas linguistique des Pyrénées Orientales publié en 1966, qui a marqué un jalon important dans la connaissance des parlers de la zone et confirmé l’existence d’une frontière bien marquée entre roussillonnais et languedocien, l’a vigoureusement rejetée[19].